Pokémon Go nourrit l’imaginaire de la génération Y, ces enfants du divorce

Je ne pense pas qu’on puisse comprendre l’énorme enthousiasme de la génération Y envers l’application Pokémon Go sans d’abord comprendre ce qui motive les membres de cette génération dans un portrait plus général.

Près de la moitié des enfants de la génération Y au Québec a vécu le divorce de ses parents. Gâtés parce qu’ils étaient souvent le seul enfant de la famille, ils ont parfois eu le privilège d’avoir deux Noëls durant l’année: le Noël chez maman et le Noël chez papa. Ces jeunes qu’on dit « Tanguy » ou « adulescent » ne sont pas rares à attendre la mi-vingtaine avant de quitter le nid familial. Profondément marqués par l’esthétique hypersexualisée des vidéoclips et publicités sexistes des années 2000’s, ces jeunes sont aussi décrits dans la littérature comme des êtres narcissiques toujours en train de prendre des égoportraits (selfies) pour séduire et se sentir apprécié. Le téléphone portable de l’enfant de la génération Y est son gadget préféré, dont il ne peut absolument se passer. Il lui sert à se créer un masque social (persona) qui est une mise en scène de soi et à communiquer de manière rapide et visuellement stimulante via SMS.

Ce qui distingue beaucoup les X des Y, c’est aussi la manière dont ils travaillent généralement bien en fonctionnement multitâches et en groupes de travail décentralisés. « Enfants Facebook », ils ont manifesté souvent un besoin de se retrouver entre amis et de partager un sentiment de faire parti d’un groupe (belonging). Ils ressentent le besoin d’appartenir à un groupe social (je dirais même appartenir à une « meute ») et ils arborent souvent des tatouages ou des vêtements qui les identifient à ces regroupements. Ils adoptent aussi fréquemment des comportements de meute sur les réseaux sociaux…

Il n’est pas étonnant, donc, de les voir se rassembler autour d’une application pour téléphone intelligent qui permet de combler le vide narcissique, se sentir membre d’un gang, et remplir cette peur inconsciente de se sentir séparé entre deux en plein développement de son sentiment de sécurité par rapport aux figures parentales plus ou moins affectueuses.

Le Pokémon est une figure qui évolue comme l’enfant qui devient adolescent puis adulte. Ce personnage est souvent mignon et il peut servir d’objet d’attachement au même titre qu’un ourson en peluche virtuel. On s’attache à son personnage Pokémon préféré. On lui donne un joli nom pour lui donner du sens par anthropomorphisme.

Finalement, j’aimerais ajouter que Pokemon Go a ce petit quelque chose de séduisant qu’on y vit la réalisation de soi en cherchant à devenir « maître ».

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