Ouellet, Cloutier, Lisée et Saint-Pierre Plamondon ont des styles de communication très différents (une analyse)

J’ai visionné avec beaucoup d’attention la captation vidéo du débat officiel du Parti Québécois à Sherbrooke et je dois dire que j’ai été heureusement surpris par la qualité des candidats au plan de l’aptitude à livrer un discours politique. Permettez-moi de présenter les styles de communication de chacun des aspirants chef au PQ d’un oeil critique. Mon regard s’est porté sur le langage non-verbal des participants, tout en cherchant les expressions ayant visiblement reçu l’adhésion des spectateurs présents dans la salle.

Cette analyse est volontairement superficielle. Elle vise à présenter les candidats selon leur mode de communication, leur manière de livrer un message. Ne soyez pas déçus, les discours étaient éclairants. Pour voir ou revoir le débat, consultez cette vidéo:

Martine Ouellet: expressive et piquante

On a souvent l’habitude de juger les femmes politiciennes selon leur tenue vestimentaire. Habillée d’un tailleur élégant qui envoyait un message de neutralité et de bon goût, Martine Ouellet se distinguait surtout au plan de l’image par son expressivité et son enthousiasme contagieux. Elle fait bonne impression en qualifiant d’emblée le gouvernement actuel du « pire » qu’elle ait jamais connu.

Mais passons l’artifice de l’image… Ouellet est une femme qui sait parler de façon structurée et brillante. Elle souligne avec brio les mots-clés propres au lexique de l’indépendance. Elle utilise l’équation: « problème = X, solution = Y » tout en faisant un crescendo dans son discours vers une fin de phrase en ascension, ce qui est excellent pour maintenir l’attention du public. Souvent, la solution donnée, c’est l’indépendance. « L’avantage de l’indépendance » est nommé comme concept-clé autour duquel orienter le débat.

Ouellet se fait huer en se distanciant du bilan de Pauline Marois en ce qui concerne Anticosti.

Martine Ouellet à propos d'Hydro-Québec, fleuron de notre économie
Martine Ouellet à propos d’Hydro-Québec, fleuron de notre économie

Expressions à 100$:

  • « Je vous le dis, ça ne sera pas une monarchie. Ça va être une république. »
  • « On s’entend qu’on s’entend pas! »
  • « Se faire avoir par un beau sourire carême (M. Harper) ou pas un monsieur selfie (M. Trudeau), ça revient au même! »

Alexandre Cloutier: à l’attaque toute!

Cloutier a clairement attaqué le bilan de Ouellet comme ministre de l’environnement dans le dossier d’Anticosti. À ce moment, il a reçu un appui soutenu du public.

Nous savons que l’être humain porte généralement plus attention aux événements négatifs que positifs lorsqu’il s’agit de discerner ce vers quoi porter son attention. En appréciant le danger, l’humain se protège ainsi d’être blessé ou de mourir.

La stratégie d’attaque de Cloutier le place en tête dans l’esprit du public comme un personnage doté de force dès les premiers instants du débat le mettant en scène. Ce passage renforce alors immédiatement la position de Cloutier sur l’échiquier politique. Il sait attaquer. Il est donc fort. Il est donc potentiellement un chef.

« Jamais je ne prendrai une décision qui est contre mes valeurs, contre mes principes. » - Alexandre Cloutier
« Jamais je ne prendrai une décision qui est contre mes valeurs, contre mes principes. » – Alexandre Cloutier

Des phrases qui marquent l’imaginaire:

  • « On est à quatre éternités d’une élection. »
  • « Travail! Travail! Travail! »
  • « Garder le jeu ouvert… »

Jean-François Lisée: « le premier ministre des PMEs », concret et précis

Cartésien et précis dans ses exemples, J-F Lisée dégage une aura rassurante. Je l’ai jugé sévèrement en le comparant trop à Stéphane Dion. Oui, Lisée est intello, mais on le sent aussi bien informé du terrain et de la souffrance du peuple. Comme un sage qui comprend les détails de son objet d’étude, on le sent aussi vif sur scène et animé de passion.

Propos sympathiques:

  • « On n’a pas besoin de demander la permission à personne! »
  • « Ce que tu proposes, c’est un traumatisme… »
  • « …et on l’aura notre pays! »
« Il faut prendre la réalité et la transformer dans nos rêves. » - Jean-François Lisée
« Il faut prendre la réalité et la transformer dans nos rêves. » – Jean-François Lisée

Paul Saint-Pierre Plamondon: pédagogue, vendeur et « un État stratège »

Avec ses bras qui semblent envelopper son public, Saint-Pierre Plamondon se présente sur scène comme un rassembleur. Il propose des idées qui font faire un regard en zoom arrière par rapport à la réalité terrain pour mieux voir le Québec dans son ensemble.

Il reçoit un accueil favorable dans la foule en disant: « Posons des gestes de souveraineté alimentaire maintenant! » et s’échauffe en pointant le public ainsi:

« On va protéger notre monde... » - Paul Saint-Pierre Plamondon
« On va protéger notre monde… » – Paul Saint-Pierre Plamondon

Autres formules gagnantes:

  • « Sans fierté comment voulez-vous un pays? »
  • « Tu as aussi la responsabilité d’être clair. »

En guise de conclusion

Les acteurs du PQ semblent bien décidés à faire du Québec un pays. À mes yeux, ils ont des talents oratoires équivalents même si j’ai trouvé Paul Saint-Pierre Plamondon le plus intéressant au plan du discours et de la communication. Je lui donne la première position au podium.

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